Le fil rouge de l’été aura malheureusement été les démantèlements de camps de Roms. Normal ?

L’Isère n’aura pas dérogé, avec à la manœuvre le préfet du tristement célèbre « discours de Grenoble » encore en place et rodé à cet exercice.

Le 26 juillet à l’aube, chaleur déjà très forte, le réseau alerte fonctionne. Le démantèlement du camp de la Tronche est commencé. Il faut venir apporter du soutien à ces personnes qui vont une fois de plus être jetées à la rue comme on ne le ferait pas pour des animaux !

Une centaine de Roms survivent là depuis deux ans, dont près de la moitié sont des enfants souvent scolarisés malgré l’opposition farouche du maire. Depuis des mois le Maire de La Tronche ne décolère pas de voir une telle tache dans sa commune. Rien n’est fait pour améliorer les conditions de vie, pas d’eau, pas d’électricité, pas de ramassage des ordures, pas de dératisation. Au contraire, stigmatisation et rejet incessants dont le refus de scolariser les enfants. Il est facile ensuite comme le fait le ministre de l’intérieur ou la première adjointe de la Tronche d’affirmer qu’on ne peut pas laisser des gens vivre dans de telles conditions d’insalubrité.

Certes, mais que n’ont-ils fait le nécessaire pour régler ces questions de salubrité publique !

Ce jour-là par contre, organisation parfaite : le quartier est quadrillé par les forces de police dès 6 heures du matin, des barrières sont dressées et la circulation est détournée. Périmètre de sécurité, personne ne passe. Des tentes sont montées constituant ainsi une annexe de la préfecture sur place. Seuls quelques journalistes auront droit à une visite guidée centrée sur l’insalubrité des lieux. Ils auraient pu demander pourquoi les autorités publiques n’avaient rien fait avant pour assurer l’hygiène… mais non… ça aurait pu être une question de journaliste pourtant.

Les familles sont réveillées à grands coups de matraques dans les portes de leurs baraques ou caravanes. Rassembler à la hâte quelques affaires, passer par le « bureau » préfectoral, et quitter les lieux – pour ceux qui ne sont pas retenus – avec ce qu’ils peuvent prendre avec eux. Ils apprennent une fois sortis qu’ils n’ont droit qu’à un voyage ! Pourquoi, comment ? Nul ne le sait mais pas moyen de retourner en arrière, c’est comme ça, c’est trop tard. Ensuite, de longues heures d’attente dans cette chaleur assommante de fin juillet autour du rond point entre Décathlon et CHU.

« Pas d’expulsion sans relogement » qu’il disait ! Ah bon, et le relogement, là, il est où ?

Rien ! Des êtres humains traités comme des chiens errants que l’on chasse à coup de pied. Après avoir cuit au soleil autour du rond point, ils ont cherché à se poser d’un endroit à l’autre, chaque fois chassés soit par la police soit par une milice probablement rémunérée par la municipalité de la Tronche. Depuis, une grande partie d’entre eux ont trouvé « refuge » dans un hangar en face de la Maison de la Culture à Grenoble. D’autres sont dans des squats ou errent comme ils peuvent avec leurs enfants et leurs baluchons.

C’était donc ça le président normal. Et cet été c’est un été normal, et la rentrée pour les enfants roms, c’est une rentrée normale ? Et cette accélération des démantèlements dans la semaine qui précède la rentrée scolaire, c’est un hasard ? C’est normal ça ?

« On juge une société à la manière dont elle traite les plus démunis » rappelait monseigneur Gaillot, totalement révolté par ces expulsions. Et bien, pour l’instant, le jugement, il est sans appel.

Et les enfants, nos élèves dans tout ça ? Nous ne sommes pas prêts de les revoir sur les bancs de nos écoles. En tout cas, la rentrée pour eux, c’est pas maintenant. Il est déjà tellement difficile pour ces enfants de prendre des repères quand ils arrivent dans une école. Et comme il est totalement impensable qu’ils restent dans les conditions où ils sont maintenant, pas question non plus de scolarisation.

Travailler, scolariser leurs enfants, avoir un logement, voilà tout ce que demandent ces membres de l’Union européenne. Vivre, quoi.

Anne Tuaillon