Depuis fin mai, les auxiliaires de vie scolaire (AVS) de l’Isère se mobilisent contre la précarité de leurs contrats. Un collectif s’est constitué en collaboration avec l’intersyndicale. Des rassemblements, des audiences, des points de presse ont permis de faire connaître les
principales revendications : Non à la précarité, réemploi des personnes, pérennisation des postes, professionnalisation et titularisations.
Voici le témoignage d’une collègue, sous forme d’une lettre adressée en novembre 2012 à la ministre de la réussite éducative :
Madame la Ministre,
Je souhaite vous alerter sur l’avenir du statut d’auxiliaire de vie scolaire (AVSi). Je suis AVSi depuis maintenant cinq ans, et mon contrat doit prendre fin le 31 août 2013.
Cette année j’accompagne une jeune fille déficiente
visuelle dans sa scolarité au collège Charles Münch de Grenoble.
J’ai choisi délibérément d’être AVS. Il ne s’agissait pas pour moi d’un « emploi tremplin », mais bien de considérer cette tâche auprès des enfants porteurs de handicap comme un étayage, qui ne peut s’instaurer que sur le long terme, dans la continuité du lien, dans une
relation de confiance qui s’ancre sur une présence continue et réelle permettant de gagner rapidement en autonomie et en efficacité.
La grande fatigabilité de ces enfants implique :
la présence d’une aide personnalisée : il faut relire les consignes, décrire les documents…
une adaptation continue et permanente à travers la création de matériel et d’outils spécifiques
enfin un ajustement qui permette d’amener l’enfant vers une certaine autonomie.
Cette aptitude d’accompagnement et de sécurisation qui mène l’élève à une meilleure intégration, s’acquiert au fil des rencontres régulières avec les enfants.
Pendant ces cinq années, j’ai acquis, je crois, une malléabilité, j’ai appris à trouver une certaine distance ni trop proche ni trop loin, non seulement avec l’enfant mais aussi avec l’enseignant, évitant une stigmatisation et favorisant l’intégration. Ainsi, l’AVS que je suis, assure,
je crois, une médiation, un rôle de tiers.
L’adaptation pour mieux aider aux différentes tâches proposées se fait à plusieurs niveaux, celui de l’enfant, mais aussi celui du groupe classe et de l’enseignant.
Il s’agit d’être attentive, patiente, discrète et exigeante à la fois, de savoir laisser des choses en suspens pour les reprendre plus tard, de prendre des initiatives en étroite collaboration avec l’enseignant.
Au regard du groupe, il s’agit pour moi de savoir à quel moment l’enfant est en situation ordinaire et à quel moment il est en situation de handicap, ce qui suppose de lui laisser un espace suffisant pour lui permettre d’être en relation avec ses pairs et de prendre du plaisir dans le groupe malgré sa différence.
Tout cela inclut de travailler avec une équipe pluridisciplinaire, en articulation étroite avec les partenaires concernés (enseignante spécialisée, enseignants et personnel du SAAAIS 38), travail qui permet le bon fonctionnement des enfants désignés.
Six ans donc de rencontres, riches, difficiles parfois, chacune différente. Je pense avoir acquis des compétences d’écoute, d’empathie, d’observation, d’analyse et des qualités relationnelles dans l’accompagnement et le suivi d’enfants porteurs de handicap. C’est cette réelle préoccupation pour l’autre qui anime mon travail.
A ce jour il est regrettable de constater que mes acquis de six années d’expériences vont s’arrêter contractuellement au 31 août 2013 et ne profiteront pas à d’autres enfants que la situation de handicap expose à
une grande vulnérabilité dans le milieu scolaire.
Ainsi je vous demande Madame la Ministre, de faire tout ce qui est en votre pouvoir afin de pérenniser ce statut si précieux d’auxiliaire de vie scolaire.
Je vous prie d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de ma haute considération.
Delphine BACCONNIER
Alors que le récent rapport Komitès ouvre des perspectives de professionnalisation, les contrats précaires sont renouvelés. Il faut
continuer à intervenir (motion dans les CA voir texte joint, pétition en ligne) et accompagner nos collègues, dès leur arrivée dans les établissements, afin de leur permettre de défendre leurs droits et s’organiser syndicalement.