Le 26 juin 2014, le Sénat a donné la possibilité aux magistrats de confier le suivi et l’exécution des peines de probation au secteur associatif.
Les professionnels de l’exécution des peines sont convaincus de la nécessité d’impliquer la société civile dans le parcours d’exécution des peines, dans un objectif de réinsertion et de prévention de la récidive. Depuis plus de 50 ans, les personnels d’insertion et de probation œuvrent déjà aux côtés d’associations, lesquelles amènent toute leur expertise sur des champs propres (accompagnement vers l’emploi avec les chantiers d’insertion, hébergement, animations socio-culturelles en détention, action sociale de première ligne, participation à la lutte contre les conduites addictives, visites de personnes détenues etc.)
Mais le partenariat entre associations et Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation (SPIP) n’est pas la mise en concurrence. Travailler "avec" n’est pas travailler "à la place de". En confiant le suivi intégral d’une mesure de probation à une association, il ne s’agit pas de partenariat, ni de collaboration, mais de la substitution du secteur privé associatif au service public de la justice en matière d’exécution de la peine.
Cette situation déstabiliserait durablement la politique d’exécution des peines ; l’incohérence qu’elle ferait naître dans le suivi et l’accompagnement des personnes placées sous main de justice nuirait aux principes de réinsertion et de prévention de la récidive, au sens de la peine. Les principes de continuité du suivi (associations fragilisées par les aléas de leurs subventions, éclatement du secteur associatif sur le territoire national, rupture du suivi entre détention et milieu ouvert), d’égalité de traitement (méthodes d’interventions distinctes et non contrôlées, absence de formation uniforme et suffisante, prestations facturées dans le cadre associatif), de neutralité ( risque de conflit d’intérêt entre la phase d’avis pré-sententiel et le choix de la mesure), notamment, ne seraient plus garantis.
Les personnels d’insertion et de probation et les acteurs de l’exécution des peines, organisations, associations qui ne veulent pas de cette confusion, invitent les parlementaires, qui se réuniront le 8 juillet en Commission Mixte Paritaire, à ne pas s’engager sur la voie de la privatisation de l’exécution de peines. Au delà de la défense du service public, c’est d’efficacité dans la lutte pour la prévention de la récidive dont il est question. Le Parlement doit prendre ses responsabilités et donner, à l’occasion du projet de loi de finances 2015, les moyens humains et matériels nécessaires aux Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation, et aux associations pour leur action sociale et médico-sociale.
Premiers signataires :
CGT
SNEPAP-FSU, SNPES-PJJ-FSU
CFDT Interco Justice
Syndicat de la Magistrature (SM)
Observatoire International des Prisons (OIP)
Syndicat des Avocats de France (SAF)
Pierre Victor TOURNIER, directeur de recherche au CNRS, Université Paris 1
Loïc LECHON, membre du jury de la conférence de consensus sur la prévention de la récidive
Yann MAURIN, expert à la conférence de consensus sur la prévention de la récidive
Hans LEFEBVRE, expert à la conférence de consensus sur la prévention de la récidive